Intégration bonifiée de l’approche par compétences (APC)

L’APC se fonde sur le développement de compétences pouvant être mobilisées dans des situations authentiques. Ces dernières font référence à des situations qui existent dans la vie quotidienne et dans lesquelles les individus sont susceptibles de devoir gérer un problème (limite, contrainte, défi, difficulté, etc.) qui est réaliste et signifiant. Par ailleurs, une compétence implique la mobilisation de différentes ressources : les savoirs, les savoir-faire et les savoir-être. Enfin, la compétence gagne à être considérée (et évaluée) selon trois perspectives : son produit, son processus et son propos (3P).

L’approche ELLAC propose une situation authentique à travers le cadre d’interaction de la LL, qui propose d’envisager celle-ci comme une situation où il y a interaction entre un sujet lecteur, le monde extérieur et un texte/altérité. Ce cadre permet d’offrir aux élèves une représentation de la compétence centrée sur une situation plus authentique que la tâche d’écriture d’un texte scolaire, actuellement au centre des devis.

Par ailleurs, les différentes ressources nécessaires à la LL ont été explicitées clairement, ce qu’aucun travail de recherche connu n’avait pris la peine de faire précédemment – particulièrement en ce qui concerne les savoir-être.

Enfin, l’approche propose une définition des trois dimensions de la compétence de LL (3P) et de la manière dont chacune de ces dimensions peut être observée (directement ou indirectement) dans une perspective évaluative nécessitant la réalisation d’une performance pouvant être observée. Plus encore, la définition fine du processus de lecture littéraire à travers quatre postures de lecture ayant, chacune, des critères de qualité susceptibles d’être observés à travers diverses situations d’expression, permet de rendre opérationnalisable l’évaluation d’une compétence mentale par ailleurs difficile à juger, car complexe à observer (Dufays, 2011 ; Le Vasseur et Sauvaire, 2016).

Intégration des nouvelles connaissances en matière de didactique de la lecture littéraire et de la littératie

Les connaissances actuelles en didactique de la littérature (Dufays, 2013, 2016 ; Sauvaire et Langlois, 2020) ainsi qu’en matière de développement des compétences en littératie (Chartrand et Prince, 2009 ; Dezutter et al., 2018) font valoir l’importance des postures de lecture participatives dans le développement d’un rapport affectif positif et signifiant à la lecture, mais aussi dans le développement de compétences cognitives de haut niveau, permettant la construction d’une interprétation plausible et critique de l’œuvre littéraire, adaptée à la richesse des textes. L’enseignement explicite de stratégies de lecture, par ailleurs, est une démarche pédagogique que la littérature scientifique (Granger et Debeurme, 2010) identifie aussi comme susceptible de soutenir le développement des compétences en littératie. Or, les stratégies de lecture sont absentes des devis, qui sont par ailleurs clairement orientés vers les postures distancées.

L’approche ELLAC propose une définition du processus de LL qui inclut de manière cohérente des postures de lecture participatives ayant un rôle spécifique tout aussi essentiel à la mobilisation de la compétence que les postures distancées. La cohérence du modèle proposé soutient la pertinence de donner une place à la subjectivité de la personne lectrice dans son apprentissage de la LL, alors que les critères de qualité suggérés pour évaluer les postures participatives favorisent l’opérationnalisation de cette subjectivité dans un cadre rigoureux. Enfin, l’explicitation des savoir-faire, centrée sur les stratégies de lecture, permet d’inclure en toute cohérence cet enseignement explicite encouragé par la recherche.

Intégration des nouvelles connaissances en matière de savoir-être

Les savoir-être sont un des types de savoirs fondamentaux au savoir-agir compétent (Boudreault, 2002). Alors que le champ d’intérêt pour les savoir-être ne cesse de croitre dans le cadre des programmes techniques centrés sur les relations d’aide, ceux-ci sont rarement abordés explicitement dans les cours de français du collégial – du moins, en tant qu’objet d’enseignement. Dans la mesure où l’APC nécessite le développement de ce type de ressources (Tardif, 2006 ; Boudreault, 2002), le fait de proposer un cadre de référence des savoir-être clair et cohérent avec la définition de la compétence de LL permet de légitimer leur présence dans l’enseignement. L’exploitation des savoir-être dans ce cadre offre une avenue pertinente pour travailler le développement global de l’individu, qui apparait pertinent dans le cadre d’un cours de formation générale.

Une actualisation qui réconcilie la compétence avec le projet de formation

L’analyse des devis permet d’observer un bris de cohérence par rapport à certaines visées ministérielles attribuées aux cours de français au collégial, notamment l’ouverture à d’autres cultures et au monde, le développement de la créativité ainsi que l’acquisition d’habiletés impliquant une sensibilité affective et artistique permettant d’« appréci[er outre] la littérature comme moyen de compréhension du monde et comme manifestation esthétique » (MEES, 2017, p. 5). La manière de conceptualiser la LL en tant qu’interaction d’un individu avec le monde et une altérité, la prise en compte de la subjectivité des personnes par le moyen des postures participatives ainsi que le regard porté sur le développement de différents savoir-être tels que l’empathie, la réflexivité ou la créativité sont autant de prises qu’offre l’approche ELLAC pour réconcilier les compétences enseignées dans les cours de littérature avec le projet de formation qui justifie ceux-ci, à savoir un projet de formation s’inscrivant dans le développement global de l’individu.